03 août 2005

Economie alternative ?


Dans une interview du 22 juin 2005, Francisco Van der Hoff, le fondateur du label Max Havelaar déclarait : « On parle du développement durable tord et à travers »

Il lui avait posé un certain nombre de questions dont celles-ci

Max Havelaar vient de labelliser le coton cette année. Cela pourrait-il permettre, par exemple, de contrer les avancées du textile chinois ?

" Nous venons en effet de nous engager dans le textile. Mais nous n'avons pas tous la même perception du marché mondial sur ce domaine. L'Europe est actuellement tres sensible aux manifestations d'hyper productivité des Chinois ... Apres tout, les Chinois font bien leur travail ... Bien sur en Europe, vous etes surpris des couts de production chinois."

Mais pourquoi les vetements doivent ils etre finalement vendus si chers ? Un pantalon produit pour deux dollars est vendu pour 40 ou 50 dollars.

Le commerce équitable peut-il etre mis en place par des multinationales, ou bien est-il voué rester le fait de petites structures ?

Les petites entreprises sont surement les plus adaptées et les plus capables pour mettre en place une production sur le mode du développement durable.

Encore faut-il se mettre d'accord sur ce que l'on entend par durable. En Amérique du Sud, nous en sommes venus a définir tres précisément la notion de durable et ce qu'elle revet pour les producteurs : une agriculture biologique qui permet de maintenir la biodiversité et donc le respect de l'environnement, ainsi que qualité et prix équitables ...

Au final, nous mettons en place une économie véritablement durable. Cette définition est vraiment importante, car aujourd' hui on a tendance à parler de développement durable pour tout et n'importe quoi, comme le font les grands groupes, sans véritablement avoir une idée précise de l'enjeu humain qu'il représente. »

Durable et social, ces termes quelques fois évoqués lors de la campagne pour la ratification du traité constitutionnel sous la forme « Economie sociale de marché hautement compétitive » n' ont malheureusement pas la même définition lorsqu?ils sont proposés par les responsables économiques de l'Union européenne.

On regroupe sous le terme « d' économie sociale » voire « « d'économie sociale et solidaire » en y incluant l'insertion par l'activité économique tout un pan de l'activité économique qui n'est pas régie par les règles traditionnelles de l'économie d' entreprise capitaliste, avec laquelle cependant elle accepte d'etre en concurrence sur le marché.

On parle aussi de troisième ou tiers secteur : le premier secteur étant le secteur capitaliste dont le but est « la maximisation du profit » par la recherche d'une clientèle solvable, et le deuxième secteur étant le secteur public dont l'activité cherche à satisfaire l'intérêt général défini démocratiquement au suffrage universel.

L' économie sociale représente aujourd'hui en France plus de 760 000 entreprises et regroupe quelque 2 millions de salariés travaillant dans le monde associatif, les mutuelles et les sociétés coopératives.

C'est un des gisements les plus fertiles en création d' emplois et plus particulièrement dans les nouveaux métiers des services à la personne et de l' insertion sociale. L' entreprise collective est une véritable alternative solidaire.

Très présente en Europe et dans le reste du monde sous des formes variées, l' économie sociale entend participer aux débats de société, en particulier apporter des réponses originales, efficaces, durables et solidaires aux problèmes de la mondialisation.

L' économie solidaire possède plusieurs formes, plus ou moins populaires, dont le versant le plus connu est le « commerce équitable» cher à Francisco Van der Hoff.

L' économie sociale et solidaire est également à l'origine des micro crédits qui après avoir pris naissance dans le tiers monde semble vouloir Être poursuivie par l'Union européenne dans le cadre de la création d?entreprises.

Bien que considérée par une grande partie des économistes et analystes comme une des pistes susceptibles de dynamiser l'emploi et la création d'entreprises, la France, n'a connu qu'un secrétaire d'état à l'économie solidaire (Guy Hascouët) que pendant la période allant de Mars 2000 à 2002.

En juillet 2002, le Medef, publiait un rapport proposant la suppression de tout avantage consenti à des entreprises d?économie sociale pouvant Être en concurrence avec des entreprises privées pour la livraison de mêmes services.

Aujourd'hui, le « plan BORLOO» concernant la cohésion sociale semble s?orienter une fois de plus vers la stratégie des emplois aidés : Contrats d'accompagnement, d?insertion, d?initiative emploi pour ne pas privilégier cette économie qui si elle reste dans certains cas marquée par des théories post-capitalistes est une des pistes les plus crédibles en ces temps de désindustrialisation.

Il serait dommage que l'Union européenne et surtout la France pour des problèmes d'idéologie se privent d'un gisement d?emplois alternatifs extremement prometteur.

Cela doit passer par une reconnaissance et une valorisation de tous les acteurs existants et un investissement des pouvoirs publics pour attirer de nouvelles populations vers cette économie.

A la question

« S'engager dans le développement durable peut-il être une stratégie économiquement rentable au niveau concurrentiel mondial ? » Francisco Van der Hoff nous donne un début de réponse

« La croissance économique qui guide le commerce mondial est peut-être la clef du problème. Si l'ensemble des richesses mondiales étaient divisées par le nombre d'habitants de cette planète, il y aurait alors pour chacun plus que nécessaire. Au moment où nous parlons, il faut Être conscient que notre planète, telle qu?elle est exploitée, peut largement nourrir, habiller et loger l?ensemble de ses habitants"

N'y a-t-il pas à méditer sérieusement cette approche de développement durable et socialement responsable qui est également un exemple d' économie alternative dont notre vieille Europe a bien besoin ?